À lire

Réduite à peau de chagrin, la construction navale américaine ragaillardie par les annonces de Trump

Industriels et experts admettent que la construction navale a besoin d’un coup de fouet aux États-Unis, après des décennies d’attrition post-guerre froide, et attendent désormais les détails du plan de Donald Trump pour « ressusciter » cette industrie.

Huntington Ingalls industries (HII) est l’un des principaux chantiers navals américains. Il est principalement mobilisé sur des programmes militaires. Ici, la mise à l’eau du destroyer furtif USS « Zumwalt » en décembre.
Huntington Ingalls industries (HII) est l’un des principaux chantiers navals américains. Il est principalement mobilisé sur des programmes militaires. Ici, la mise à l’eau du destroyer furtif USS « Zumwalt » en décembre. | HII
  • Huntington Ingalls industries (HII) est l’un des principaux chantiers navals américains. Il est principalement mobilisé sur des programmes militaires. Ici, la mise à l’eau du destroyer furtif USS « Zumwalt » en décembre.
    Huntington Ingalls industries (HII) est l’un des principaux chantiers navals américains. Il est principalement mobilisé sur des programmes militaires. Ici, la mise à l’eau du destroyer furtif USS « Zumwalt » en décembre. | HII

 C’est un moment historique , s’est réjoui Matt Paxton, président du Shipbuilders council of America (SCA), qui représente plus de 150 entreprises américaines de chantiers navals. L’annonce présidentielle mardi 4 mars devant le Congrès de relancer la construction navale américaine s’inscrit dans un contexte favorable, avec le dépôt fin 2024 d’un projet de loi biparti pour revigorer l’industrie.

 Nous construisions tellement de navires, a déclaré Donald Trump, annonçant la création d’un Bureau de la construction navale rattaché à la Maison Blanche. Mais nous allons en fabriquer très vite, très bientôt , promettant des  avantages fiscaux spéciaux . Sans autre détail à ce stade.

 Nous attendons d’en savoir davantage. La construction navale représente clairement une faiblesse industrielle des États-Unis , relève à l’AFP Cynthia Cook, directrice au Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS). Mais on ne peut pas régler immédiatement le problème en déversant de l’argent . Selon le cabinet McKinsey, la production américaine a diminué de 85 % depuis les années 1950 et le nombre de chantiers navals pouvant construire de grands navires a chuté de plus de 80 %.

Une gouttelette face à la Chine

Dans les années 1970, 5 % des navires commerciaux fabriqués dans le monde (en tonnage brut) l’étaient aux États-Unis. Leur part n’est plus que d’environ 1 %, une gouttelette face à la Chine (50 %), à la Corée du Sud (26 %) et au Japon (14 %).  Nous avons besoin d’une solution pour combler ces écarts , souligne Cynthia Cook, relevant que Séoul et Tokyo sont néanmoins des  alliés  des États-Unis.

 Je reconnais totalement que la capacité des chantiers navals américains n’est plus ce qu’elle était, déclarait en février Matt Paxton devant une commission parlementaire. Notre marché a radicalement changé depuis la Seconde Guerre mondiale, lorsque les priorités des administrations, républicaines comme démocrates, ont taillé les programmes  de défense, relevait-il, identifiant un tournant après la chute de l’Union soviétique.

La flotte de l’US Navy est passée, selon lui, de 471 navires en 1992 à 295 actuellement. D’après son plan 2025, elle souhaite 390 navires en 2054, ce qui signifierait l’achat de 364 nouveaux vaisseaux en incluant le désarmement des unités vétustes, selon le Bureau du Congrès pour le budget (CBO), qui a chiffré le coût annuel autour de 40 milliards de dollars. Pour Matt Paxton, l’administration Trump devrait concevoir une  stratégie industrielle complète […] pour avoir une vision holistique  de la situation et optimiser les contrats, puis réduire le poids administratif et réglementaire pour accélérer le processus.

« En retard et hors budget »

 Quasiment chaque gros programme […] est en retard, hors budget ou irrémédiablement hors des clous , constatait le sénateur républicain Roger Wicker, à l’audition fin février de John Phelan, désigné ministre de la Marine américaine. Pour les industriels, les nombreux changements exigés par la Navy pendant la construction génèrent retards et dépassements budgétaires.

Autre volet crucial : la pénurie de main-d’œuvre, estimée autour de 20 % pour des effectifs de plus de 100 000 personnes. La pandémie a entraîné dans la navale, comme dans la construction aéronautique, une vague de départs en retraite, un creux dans la formation et des bifurcations de carrières. Et, avec un chômage au plus bas, les salaires sont moins compétitifs face à d’autres emplois moins  exigeants physiquement .

Ces entreprises produisent et entretiennent les navires gouvernementaux – US Navy, garde-côtes, armée de Terre, administration océanique et atmosphérique nationale (Noaa) – ainsi que les quelque 40 000 navires commerciaux américains. Les navires à propulsion nucléaire sont entretenus par quatre infrastructures gouvernementales. La construction navale contribue, directement et indirectement, à plus de 40 milliards de dollars au produit intérieur brut (PIB) américain.

Elle est  robuste  et fabrique  beaucoup de navires, très sophistiqués , mais principalement pour le marché domestique, a relevé Matt Paxton, avançant que Donald Trump souhaitait probablement que les États-Unis retrouvent une place sur le marché international. Mais la concurrence y est vive car ce secteur reçoit moult subventions et avantages fiscaux, surtout en Chine, relèvent plusieurs sources.  Nous travaillons en collaboration avec le gouvernement pour augmenter la capacité industrielle et accélérer la production de nos chantiers navals pour répondre à la hausse générationnelle de la demande , a commenté un porte-parole de Huntington Ingalls industries (HII), groupe figurant dans le trio de tête des industriels américains.

Le marin Numérique

1 an pour 290€ soit 24,17€/mois

  • cocheL'accès illimité aux articles
  • cocheLa newsletter quotidienne
  • cocheLes dossiers mensuels et les hors-séries en numérique
Je m'abonne
fermer