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Les soldats morts pour la France en 1940 méritent une commémoration

Près de 100 000 soldats français furent tués en tentant de défendre leur pays contre les troupes allemandes en 1940. Notre histoire et nos mémoires les ont oubliés, il est temps de réhabiliter ces premiers résistants.

Publié le 08 mai 2015 à 12h07, modifié le 14 mai 2015 à 14h59 Temps de Lecture 3 min.

Par Charles de Laubier

Nous célébrons le 8 mai 2015 le soixante-dixième anniversaire de la victoire de la France sur le Nazisme, grâce à nos Alliés. Mais nous ne célébrerons pas encore cette année le soixante-quinzième anniversaire de la défaite de mai 1940 où, sur quelque 5 millions de militaires français mobilisés, près de 100 000 d’entre eux perdirent la vie en essayant de défendre notre pays. Ce déni de mémoire, qui confine au tabou, doit maintenant cesser. Il est temps de réhabiliter ces premiers résistants qui sont morts pour avoir tenté d’empêcher l’invasion de notre pays par l’armée d’Hitler. Ces soldats ont eu la double peine : ils ont non seulement perdu la vie durant la Bataille de France, mais ils sont aussi morts une seconde fois dans nos mémoires, dans notre Histoire.

Cela fait soixante-quinze ans que l’Etat français et ses institutions militaires les ont volontairement oubliés, pour refouler « la honte de la débâcle » de mai-juin 1940 – cette « étrange défaite ». Ces premiers soldats français tombés au champ d’honneur au début de la Seconde guerre mondiale n’ont jamais été commémorés, afin que la France n’ait pas à évoquer cette défaite politique et militaire, qualifiée de « funeste », face à un ennemi nazi avec lequel le régime de Vichy va se mettre aussitôt – dès le « Il faut cesser le combat » du 17 juin 1940 proféré par Pétain à la radio – à collaborer durant les cinq années suivantes.

Ces combattants de la première heure sont pourtant des héros : alors sans Alliés prêts au combat, sans réseaux de résistance, et avec des forces armées dirigées « comme en 14 », c’est-à-dire non modernisées, ils sont quand même allés sur le front des Ardennes (souvenons-nous de l’inattendue percée allemande de Sedan, de la bataille de Stonne...), de la Meuse, de la Somme ou encore des Alpes. Ils ont été les premiers à s’opposer à Hitler. « Certes, nous avons assez souffert pour n’oublier jamais notre désastre initial (…), pratiquement isolés à l’avant-garde des démocraties », dira plus tard le général de Gaulle.

Ces éclaireurs de la liberté – victimes de l’offensive allemande de mai 1940 – méritent maintenant de recevoir les honneurs qu’ils méritent tout autant que les 200 000 soldats et résistants français et les 300 000 soldats américains morts durant le conflit pris dans son ensemble. Ne pas les reconnaître ni les réhabiliter dans l’histoire de France, c’est perpétuer l’esprit de Vichy, de Pétain et de sa « Révolution nationale ».

À ces hommes – militaires des troupes françaises ou de régiments coloniaux – tombés en mai-juin 1940, un hommage national doit enfin être rendu. Pour que la France se souvienne de cette résistance de la première heure, de tous ces premiers résistants morts au combat qui ont sauvé l’honneur, pour que la campagne de France soit racontée dans les livres d’histoire comme une bataille perdue précédant la victoire de 1945. Tant que ce devoir de mémoire ne sera pas fait, la France antirépublicaine de Vichy l’emportera sur le courage de la France de la Libération. C’est au président de la République française de remettre aujourd’hui les pendules à l’heure et de rétablir la vérité historique de cette période cruciale.

Un mémorial de la Bataille de France pourrait être dressé. Une date de commémoration pourrait être fixée en 1940, par exemple le jour de la percée surprise de Sedan par la Wehrmacht franchissant la Meuse. Et cessons de faire du 11 novembre (l’armistice de 1918) le « Memorial Day » (jour du souvenir) de tous les soldats morts pour la France à partir du seul XIXe siècle, quelles que soient les guerres, coloniales, opérations extérieures et autres (loi du 28 février 2012). Car c’est une façon pernicieuse de continuer à ignorer nos premiers résistants, ceux de 1940.

 

Charles de Laubier est journaliste

Le Monde

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