COVID-19: fort recul des taux de mortalité depuis le printemps

La COVID-19 fauche nettement moins qu’au printemps dernier, et ce n’est pas seulement parce que la deuxième vague a frappé davantage les jeunes ni parce qu’on teste plus, selon un rapport de l’Institut de la santé publique (INSPQ) sur le taux de mortalité du coronavirus dévoilé mardi matin. Les causes derrière ce recul ne sont pas entièrement claires, mais ce pourrait bien être un effet de l’amélioration des soins à mesure que les connaissances ont progressé, selon des médecins interviewés par Le Soleil.


Le document de l’INSPQ a examiné tous les décès liés au nouveau coronavirus survenus au Québec depuis le début de l’épidémie jusqu’au 12 septembre. Dans un premier temps, soit avant le 12 juillet, la COVID-19 a tué 5700 personnes sur 56 500 cas confirmé, ou 10,1%. Mais par la suite, du 12 juillet au 12 septembre, ce taux de mortalité ne fut plus que de 1,3 % (116 sur 8700).

Il est évident qu’une partie de cette baisse est «artificielle» puisqu’on teste bien davantage maintenant qu’au printemps et que la seconde vague a infecté des gens en moyenne plus jeunes et moins vulnérables. Mais il n’y a que ça, conclut le document, «notamment parce qu’elle [la baisse du taux de mortalité] s’observe aussi parmi les personnes hospitalisées», dont le taux de mortalité n’est pas, ou très peu, influencé par les efforts de dépistage. Chez cette clientèle hospitalisée, la «létalité», comme l’appelle le rapport, est passée de près de 28 % avant le 12 juillet à moins de 18 % par la suite.

En outre, le recul des taux de mortalité a été remarqué dans tous les groupes d’âge — de 33 % à 14 % chez les 70 ans et plus. La diminution fut aussi évidente chez les patients vivant en CHSLD, où la COVID-19 a fauché 41 % des cas confirmés au printemps et au début de l’été, contre 24 % passé le 12 juillet.

Bref, il semble bien qu’il se passe «quelque chose», même si le document invite à considérer ces chiffres avec prudence et qu’il ne propose pas de mécanisme pour les expliquer.

«Ce phénomène, soit une baisse de la mortalité qui n’est pas complètement expliquée par les changements démographiques dans les populations touchées, a aussi été documenté dans d’autres endroits, en autres au Royaume-Uni et à New York», indique l’infectiologue et professeur à l’Université de Sherbrooke Alex Carignan. Dans une étude parue à la fin d’octobre dans le Journal of Hospital Medicine, en effet, des cliniciens-chercheurs de l’Université de New York ont constaté qu’en mars dernier, 26 % des patients hospitalisés avec la COVID-19 décédaient, mais qu’en août, ce n’était plus que 8 %. (Notons que ces taux ont été «ajustés» statistiquement pour tenir compte des caractéristiques démographiques et cliniques des patients, qui ont changé dans le temps, et qu’ils ne sont donc pas directement comparables avec les taux québécois mentionnés plus haut.)

«Ce n’est probablement pas lié à un seul élément, une seule «magic bullet», suppute Dr Carignan. Plusieurs choses expliquent possiblement cette baisse de la létalité.»

Certaines unités de soins intensifs de Montréal ont été littéralement débordées lors de la première vague, rappelle-t-il, ce qui amoindri habituellement la qualité des soins qu’il est possible de prodiguer. Et comme la recherche a permis de mieux connaître la maladie, on parvient maintenant à mieux la traiter, même s’il n’existe pas encore d’antiviral efficace contre la COVID-19. «On a documenté l’effet de la dexamethasone [ndlr : un corticostéroïde qui réduit l’inflammation] sur la mortalité et on l’utilise plus, témoigne Dr Carignan. (…) On a aussi abandonné des traitements futiles comme l’hydroxychloroquine [ndlr : médicament contre la malaria qui a été vanté comme traitement anti-COVID par l’infectiologue français Didier Raoult et certains politiciens, mais dont plusieurs études ont montré l’inefficacité par la suite] et le lopinavir/ritonavir [ndlr : deux médicaments utilisés en combinaisons contre certains virus].»

Il est par ailleurs possible, poursuit Dr Carignan, que les gens soient maintenant mieux informés et qu’ils attendent moins avant de se présenter à l’hôpital — et on augmente les chances de survie quand la maladie est prise en charge plus tôt. De la même manière, on peut aussi imaginer que le port généralisé du masque pourrait réduire la «dose» initiale de virus reçue par les patients, ce qui pourrait réduire leurs symptômes par la suite, mais ce ne sont là que des hypothèses qui demandent validation, avertit le chercheur.