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Grand Angle

Les élus de Tiznit sonnent la charge contre les migrants subsahariens

S’éloignant du référentiel islamiste de son parti qui invite à l’accueil des étrangers en détresse, un député pjdiste de Tiznit a adopté des propos hostiles envers les migrants subsahariens victimes de transferts forcés vers sa ville. Une réaction suivie par l'ensemble des élus de la majorité au conseil communal de Tiznit.

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Photo d'illustration / DR
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Puisant dans la prose des partis d’extrême droite en Europe et ailleurs, un député du PJD s’en est violement pris aux migrants subsahariens installés au royaume. Dans une question écrite adressée au ministre de l’Intérieur le 28 mai 2019, Brahim Boughaden considère que les «migrants subsahariens» déplacés par la force vers sa circonscription ont «un impact négatif sur le tissu social d’une ville moyenne comme Tiznit, connue pour son cachet calme et la cohésion entre ses composantes humaines».

Pour éviter d’être taxé de «raciste», le parlementaire islamiste a fait montre d’une certaine «sensibilité (...) aux conditions humaines désastreuses» que vivent les membres de la communauté des migrants, «avant de quitter la ville en direction des villes du Nord encore une fois», a-t-il souligné. Mais visiblement aveuglé par son hostilité à l’égard de la présence des Subsahariens à Tiznit, le député de la Lampe a fait fi des règles de bienséance linguistique dans les correspondances officielles, qualifiant les transferts forcés des migrants de «déchargement d'Africains» qui, selon lui, aurait conduit à la «prolifération de la mendicité sur les routes et les axes» de Tiznit.

Boughaden a conclu sa question écrite en s’interrogeant sur «les raisons qui président aux déplacements des Africains originaires de pays de l’Afrique subsaharienne tout particulièrement vers Tiznit». Il a également exigé du département de Abdelouafi Laftite de «prendre des mesures pour mettre un terme à cette opération».

Le PJD-RNI-PPS unis dans la chasse aux migrants

Ce ras-le-bol, exprimé avec des termes qui s'éloignent du principe de tolérance proné dans les discours du PJD, a trouvé écho dans le communiqué de la majorité à la Commune de Tiznit. Le 30 mai, suite à une réunion, la coalition dirigeante de la ville, composée du PJD, du RNI et du PPS a condamné «l’inondation de la ville de Tiznit par de nombreux phénomènes sociaux», évoquant les malades mentaux et les migrants africains subsahariens, au grand dam de la volonté de la population et son droit de vivre dans la dignité et la sécurité».

Le texte s’interroge aussi sur «la véritable raison derrière le choix de Tiznit en tant qu'espace d’accueil», rappelant notamment «l’absence de centres d'accueil ou de structures industrielles et économiques pour assurer l’emploi» à cette catégorie. Une situation «déplorable qui inquiète la population locale, compte tenue de l’augmentation du nombre de ces migrants africains», poursuit le texte.

Le précédent de l'UC

Ce discours hostile aux migrants -bien que moins fréquent que dans les pays d'Europe ou plus proche de nous chez le voisin algérien- ne constitue pas une nouveauté. En mai 2017, Mohamed Addal, un conseiller de l’Union constitutionnelle à la Chambre haute, avait estimé que «les villes marocaines sont désormais polluées par les migrants subsahariens». Des propos tenus devant le chef de la diplomatie marocaine à l’occasion d’une réunion de la Commission des Affaires étrangères.

En septembre 2013, le Maroc a adopté une nouvelle politique migratoire, marquée par le lancement de campagnes de régularisations au profit des migrants clandestins.

Par ailleurs, deux propositions de loi signées par les groupes du PAM et de l’Istiqlal à la Chambre des représentants, déposées respectivement en 2013 et 2014 et pénalisant les actes et propos racistes, attendent depuis d’être examinées par les députés.

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