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MAROC

Dans le sud du Maroc, les tiraillements entre une entreprise minière et les habitants d'un village voisin

Photo de la commune d'Askaoun, voisine de la mine d'argent de Zgounder, dans le sud du Maroc.
Photo de la commune d'Askaoun, voisine de la mine d'argent de Zgounder, dans le sud du Maroc.
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Dans le village d’Askaoun, dans le sud du Maroc, les habitants d’un village se sont rassemblés au sein d’une association pour faire entendre leurs doléances contre une entreprise canadienne qui exploite la mine d’argent de Zgounder, à proximité de la commune. Exploitation non consentie des terres, détournement d’un point d’eau… Problème : l’entreprise est légalement dans son droit.

Le village d’Askaoun se trouve dans les terres, au nord-est d’Agadir. Dans ce paysage aride, les paysans du douar (village en marocain) ne disposent que d’une infrastructure sommaire : quelques habitations, une route non asphaltée et des poteaux électriques… Pourtant, à un kilomètre de là, se trouve la mine d’argent de Zgounder, exploitée depuis 2014 par une entreprise canadienne cotée dans la bourse marocaine, Maya Gold and Silver.

L’implantation de cette entreprise et la réactivation d’une mine dont l’activité s’était arrêtée pendant plusieurs années, étaient porteuses d’une promesse de développement pour la région. Toutefois, si les habitants du village reconnaissent qu’il y a eu des embauches dans leurs rangs, ils déplorent les conséquences de cette activité sur la vie du village depuis plusieurs années : nuisances sonores à cause de la proximité, pollution, exploitation non consentie de leurs terres et coupure d’eau.

Lettre envoyée au ministère de l’Énergie et des Mines par le groupe parlementaire du parti majoritaire Justice et développement (PJD), où ils portent à sa connaissance les doléances des habitants du village.

"Nous avons écrit aux autorités locales, mais nos sollicitations sont restées lettre morte"

Abdellah Ahben est membre d'une association locale d'habitants qui milite pour faire valoir leurs droits auprès de la société et qui s'est entretenu, à diverses occasions, avec les responsables locaux et les représentants de l'entreprise.

Les conséquences de l'activité minière de cette entreprise sont nombreuses. D'abord, il y a eu la construction de nouvelles unités d'exploitation pour l'usine qui s'est faite sur les terres du village. Or, ces terres nous appartiennent, et nous demandons donc réparation pour cela.

Contacté par France 24, le directeur général de Maya Gold and Silver, Noureddine Mokadem, a affirmé que son entreprise était prête à signer une convention avec les habitants pour occupation légale des terrains. Or, il s'agit selon lui de "terrains collectifs" qui n'ont pas de propriétaires. Une réponse contestée par Abdellah Ahben :

Ces terres ont toujours appartenu aux habitants du village, bien avant l'existence de registres officiels. Nous avons approché à plusieurs reprises les autorités locales pour faire valoir nos droits et nous fournir des titres de propriété, mais nos sollicitations sont restées lettre morte.

Lettre adressée aux autorités locales pour demander l'octroi des titres de propriété afin de faire valoir les droits des habitants auprès de l'entreprise canadienne.

En plus des terres, les habitants se plaignent également de l'assèchement en eau, détournée par l'entreprise pour extraire le précieux minerai. Or, là aussi, le directeur de l'entreprise clame qu'il est légalement dans son bon droit :

"L'eau qui sert à l'extraction de l'argent vient de Ouarzazate. Elle a été détournée par les autorités au début des années 1980 pour servir les activités de la mine. Avec l'arrêt de l'extraction d'argent pendant plusieurs années, la population s'est habituée à se servir de cette eau pour l'irrigation de ses cultures ou l'abreuvement de son bétail. Or, maintenant que l'activité de la mine a repris, il est normal que l'usine utilise à nouveau cette eau qui a été amenée ici pour la mine."

Les habitants du village demandent encore aujourd'hui que l'entreprise leur fournisse un accès à l'eau en dédommagement, ainsi que la contribution à l'effort de développement de la région. Autant de promesses auxquelles s'est engagée l'entreprise en signant les procès-verbaux de plusieurs réunions qui se sont tenues en présence des membres de l'association du village.

Procès-verbal du 6 juin 2018 où il est signalé que les autorités locales fourniront au plus vite les titres de propriété aux habitants afin que ces derniers puissent faire valoir leurs droits auprès de l'entreprise. De même, il est demandé que les projets de développement abordés dans de précédentes réunions (notamment fournir le village en eau) soient mis en place au plus vite. Le document est signé par l'association des villageois, l'entreprise et la commune d'Askaoun.

En plus de l'impossibilité de faire légalement valoir des droits que l'entreprise ne semble pas renier, l'association du village affirme que l'activité minière a des conséquences écologiques déplorables sur l'environnement du village, à cause des déchets chimiques rejetés par l'extraction minière. S'il n'existe pas d'analyse qui conforte ces accusations, un courrier du ministère de l'énergie et des mines datant de l'année dernière affirme que plus de 50 % de la production d'argent se fait désormais par la technique de flottation, en lieu et place d'un traitement au cyanure (cyanuration). Ce procédé "permettrait de limiter les conséquences écologiques dont pourraient être responsables les anciennes unités de production". Il est par ailleurs stipulé dans le courrier que l'activité minière de l'entreprise a bien fait l'objet d'une étude d'impact environnementale et qu'elle a été agréée en 2014.

Courrier du ministère à l'adresse de l'association des habitants du village, à propos des techniques d'extraction.

La rédaction de France 24 a tenté de joindre les autorités locales, sans succès.

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