Consett Iron Company

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Consett Iron Company
logo de Consett Iron Company

Création Voir et modifier les données sur Wikidata
Disparition Voir et modifier les données sur Wikidata
Siège social ConsettVoir et modifier les données sur Wikidata
Actionnaires British SteelVoir et modifier les données sur Wikidata
Activité Sidérurgie et extraction de charbonVoir et modifier les données sur Wikidata
Site web www.dmm.org.uk/company/c002.htmVoir et modifier les données sur Wikidata

La Consett Iron Company Ltd est une ancienne entreprise sidérurgique basée à Consett, en Angleterre. Fondée vers 1864, en reprenant les actifs de la Derwent & Consett Iron Company Ltd, qui succédait elle-même à la Derwent Iron Company fondée en 1840, l'entreprise prospère tout au long du XIXe siècle, puis régresse peu après la Seconde Guerre mondiale.

Comme la plupart des entreprises sidérurgiques britanniques, elle connaît alors une série de nationalisations suivies de privatisations, qui n'enrayent pas son déclin. Les restructurations successives se finissent avec la fermeture de l'usine sidérurgique de Consett, en 1980.

Formation de l'entreprise (1840 - 1869)[modifier | modifier le code]

En 1840, un groupe d'hommes d'affaires locaux mené par Jonathan Richardson fonde la première des entreprises sidérurgiques de Consett, la Derwent Iron Company, dans le comté de Durham, pour extraire et fondre le minerai de fer houiller proche de la ville[1],[2]. Mais le meilleur minerai (c'est-à-dire le plus riche en fer) est rapidement épuisé. L'entreprise appuie alors les prolongations des voies de chemin de fer locales, dont le chemin de fer de Stockton et Darlington. Elle accède ainsi à de nouveaux gisements de minerai de fer dont, à partir de 1851, le minerai de la formation de Cleveland, près d'Eston[note 1]. En 1856, l'usine de Consett exploite 7 hauts fourneaux, tous datés de sa fondation, c'est-à-dire édifiés entre 1839 et 1840[4].

En 1857, la Consett Iron Company doit à la Northumberland and Durham District Bank près d'un million de livres sterling[note 2]. Elle est alors mise en vente, mais une tentative de vente à la jeune Derwent and Consett Iron Company échoue[2]. Le , après avoir côtoyé la cessation de paiements pendant plusieurs années, une nouvelle Consett Iron Company Ltd est formée[5],[6], avec un capital de 400 000 £ consistant en 40 000 actions de 10 £ et J. Priestman en tant que directeur général. Deux députés, Henry Fenwick (en) et John Henderson (en), font partie des directeurs. L'entreprise exploite alors 18 hauts fourneaux et peut produire 80 000 t/an de fonte brute et 50 000 t/an de produits finis en fer. Elle est également propriétaire d'un millier de maisons ouvrières et de 200 hectares[2], c'est une des plus grandes usines du pays :

« La plus grande usine du groupe [du nord-est de l'Angleterre] est Consett, située à environ 8 lieues de Durham, sur le chemin de fer Durham-Consett. Elle contient 160 fours à puddler environ et 3 trains de puddlage, et 48 fours à réchauffer de toutes espèces. Ses ateliers de laminage possèdent 5 trains simples, avec cylindres de 60 cm de diamètre, et deux trains doubles […]. Il y a en outre un très beau train à rails capable de fournir par semaine 800 à 1 000 tonnes de rails. La compagnie de Consett possède 10 locomotives et occupe, tant à ses usines qu'à ses houillères, environ 6 000 ouvriers[7]. »

— Samson Jordan (1872). Métallurgie du fer et de l'acier : études pratiques et complètes sur les divers perfectionnements apportés jusqu'à ce jour dans la fabrication de ces deux métaux, p. 319-328.

Prospérité impulsée par William Jenkins (1869 - 1900)[modifier | modifier le code]

Évolution de la rentabilité de la Consett Iron Company[8]
Année Bénéfice
(k£/an)
Taux de profit
(% du capital)
1865 39 12
1870 102 24.5
1875 215 33.7
1880 104 15.6
1885 60 8.6
1890 366 38.6
1895 115 8.6
1900 673 38.7
1905 245 13.6
1910 221 12.4

Sous la direction de William Jenkins, general manager de 1869 à 1894 et qui décède en 1895, l'entreprise devient durablement bénéficiaire pour la première fois[9]. Ces bons résultats s'obtiennent malgré un marché particulièrement instable[10], comme la crise industrielle qui a sévi de la fin des années 1870 au début des années 1890[11]. L'entreprise conserve de fortes sommes sous la forme de capital plutôt que de verser des dividendes à ses actionnaires. Ainsi, elle dépend moins des emprunts lorsque le conjoncture se retourne, et emprunte à de meilleurs taux lorsqu'elle doit le faire[10]. Les employés bénéficient d'écoles, d'églises, d'un parc, d'un hôpital et d'autres infrastructures[9]. La part de marché de l'entreprise dans la production sidérurgique britannique atteint le niveau record de 7,1 % en 1894, puis chute à 4,2 % en 1910[12] : les historiens de l'économie H. W. Richardson and J. M. Bass soulignent le bon sens des affaires et les choix judicieux de managers dus à William Jenkins[13].

Vers 1876, les chemins de fer abandonnent le fer puddlé au profit de l'acier pour les rails. La production à Consett s'effondre alors de près d'un tiers. L'entreprise se réoriente vers la production de tôles, dont la demande croissante est tirée par la construction navale. Puis en 1882, le procédé Martin-Siemens est adopté pour réaliser ces tôles en acier, le premier convertisseur de ce type étant opérationnel en 1883[14]. En 1887, la production d'acier se généralise aux produits longs dans toute une gamme de sections, allant des cornières aux poutrelles pour la construction navale. Pour développer cette production, le laminoir d'Angle, doté d'une capacité de production de 78 000 tonnes de profilés par an, est construit sur un site de 6,4 hectares[15].

« En 1889, Consett atteint le zénith de son développement, quand [le laminoir d'Angle] est la plus grande usine de fabrication de tôles du monde[16]. » Vers 1892, l'entreprise possède 7 hauts fourneaux et 10 mines de charbon[17]. En plus de la production d'acier, une fonderie, située à un mile de Consett, à Crookhall (en), est capable de produire 150 tonnes par semaine de produits moulés en acier. L'entreprise dispose également d'une briquerie d'une capacité de 12 000 briques par semaine. Les avoirs fonciers croissent jusqu'à atteindre environ 2 700 maisons ouvrières. Une infirmerie de 16 lits sert à traiter les accidentés du travail. Les 6 000 employés touchent un salaire mensuel moyen de 5,33 £[18]. Des investissements sont continuellement réalisés pour moderniser l'outil, comme des compresseurs Roots fournis par Robinson Thwaites (en) en 1893[19].

Un lent déclin, entre routine industrielle et stratégies confuses (1900 - 1966)[modifier | modifier le code]

Après le départ à la retraite de William Jenkins, George Ainsworth occupe le poste de general manager. L'entreprise maintient d'abord ses bénéfices[20] mais l'outil industriel n'est pas modernisé, notamment à cause du manque de place à Consett ; un déménagement étant étudié avant d'être rejeté. L'entreprise ne bascule pas sur la motorisation électrique comme ses concurrentes et ses machines à vapeur deviennent bientôt obsolètes[21].

En 1924, la capitalisation de l'entreprise est valorisée à 3 500 000 £, elle émet 1 500 000 £ d'obligations [note 3]. En 1938, l'entreprise participe au financement de la nouvelle Jarrow Steel Company, issue de la défunte Palmers Shipbuilding and Iron Company, dont l'effondrement en 1933 avait généré la Jarrow March (en) en 1936. La Consett Iron Company adapte sa production pendant la Seconde Guerre mondiale en utilisant des minerais de plus mauvaise qualité. À cette époque, l'entreprise emploie 12 000 personnes[1].

En 1947, toutes les mines de charbon de l'entreprise sont nationalisées et passent sous le contrôle de la National Coal Board (en). En 1951, c'est au tour du reste de la Consett Iron Company d'être nationalisée par le gouvernement travailliste de Clement Attlee, au sein de la brève Iron and Steel Corporation of Great Britain (en) qui rassemble l'industrie sidérurgique britannique au moment de sa nationalisation. Mais, dès 1955, l'usine sidérurgique de Consett est privatisée par le troisième gouvernement Chruchill (en), alors qu'un nouveau laminoir est ouvert en 1961 pour approvisionner la construction navale. À cette époque, 6 000 employés travaillent dans l'usine de Consett[1].

En 1964, une nouvelle aciérie à l'oxygène est construite[22] pour un coût de 9 000 000 £[note 4]. Elle est équipée de 2 convertisseurs LD et de 2 Kaldos, tous de 100 tonnes de capacité[23]. Mais dès 1966, la production Kaldo est devenue marginale[24],[note 5], pénalisée par l'importante consommation en matériau réfractaire des convertisseurs ainsi que la baisse du prix des minerais à bas phosphore qui servent à la production de fonte pour le procédé LD[26].

La fin (1967 - 1980)[modifier | modifier le code]

L'usine sidérurgique de Consett est renationalisée en 1967, cette fois par le gouvernement d'Harold Wilson. Elle est intégrée dans la British Steel Corporation (en), à un moment où la production britannique d'acier, de charbon et de navires est en net déclin[1]. À ce moment, l'industrie sidérurgique britannique est devenue routinière, surcapacitaire et exploite des outils obsolètes. Le coût des matières premières comme du pétrole s'envole, et le capital manque pour moderniser l'équipement. La politique gouvernementale consistant à maintenir artificiellement le plein emploi complique l'organisation[27]. Le premières restructurations arrivent immédiatement : en 1968, un Kaldo est transformé en troisième LD, de 150 tonnes, et en 1971, le dernier Kaldo est transformé de la même manière[26].

Terra Novalis, une sculpture en acier inoxydable sur le site de l'usine de Consett.

La fermeture de l'usine sidérurgique, en 1980, s'accompagne d'intenses débats et de nombreuses manifestations. De 3 000 à 4 000 travailleurs perdent leur emploi, entraînant un taux de chômage de 35 % à Consett, soit deux fois la moyenne nationale de l'époque[28],[29].

Le ciel au-dessus de Consett, bien connu pour son épais brouillard orange de poussières d'oxyde de fer issues des usines, se dissipe alors[1], tout comme les nuages de vapeur émis par les tours aéroréfrigérantes et les cheminées[30],[31]. Quelques anciens sidérurgistes participent à la démolition de l'usine[32].

Presque toute trace d’activité sidérurgique a depuis disparu. Seule la sculpture Terra Novalis, édifiée à partir de matériaux issus du site, concrétise une forme de mémoire[33],[34]. La situation de l'emploi retourne à la normale dans la décennie suivante, le tissu économique se reconstituant sur une base plus diversifiée[35].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. En 1842, l'entreprise achète la section sud du réseau de l'ancienne Stanhope and Tyne Railway (en) pour accéder à de nouveaux gisements de minerai. Après que la West Durham Railway (en) ait construit une ligne vers la gare de Crook (en), le chemin de fer de Stockton et Darlington est prolongé grâce à l'Extension de Weardale (en), inaugurée le et nommée ainsi car elle permet la jonction avec le chemin de fer de Weardale (en).
    De là, la Derwent Iron Company peut proposer une nouvelle prolongation de la gare de Crook jusqu'au pied de la pente de Meeting Stacks. Une fois réalisée, cette prolongation aboutirait à la gare de Waskerley, qui permettrait à l'entreprise d'à la fois expédier la chaux et les produits sidérurgiques, et d'accéder à plus de minerai. Ayant obtenu une extension de son droit de passage auprès de l'évêque de Durham, la Derwent Iron Company fait approuver ses plans à la Stockton and Darlington Railway, qui les accepte à condition que l'entreprise sidérurgique lui loue toute la partie sud du réseau de l'ancienne Stanhope and Tyne Railway. La construction de la section de Stanhope à Carrhouse sur la propriété de la Stockton and Darlington Railway commence le , les 16 km de l'Extension de Weardale à partir de la jonction de la vallée de la Wear (en) étant ouverts à la circulation le [3].
  2. Soit 102 millions de livres sterling de 2015, d'après le calculateur de la Bank of England.
  3. Soit en livres sterling de 2015, une valorisation de 192 millions et une émission d'obligations pour 82 millions, d'après le calculateur de la Bank of England.
  4. Soit en livres sterling de 2015, un investissement de 167 millions, d'après le calculateur de la Bank of England.
  5. Qualifier d'erreur stratégique le choix de la technologie Kaldo est un point de vue fréquent. Pourtant, combiner le procédé Kaldo avec un procédé de type LD, plus productif mais, à l'époque, encore incapable de produire des aciers de qualité, a du sens. C'est d'ailleurs le choix de l'usine sidérurgique de Gandrange-Rombas qui, en 1969, construit une aciérie dotée de 2 convertisseurs Kaldos — les plus gros jamais construits — et 2 convertisseurs LD. À Consett, « deux points de vue se sont dégagés, un moderne, radicalement orienté coût, et une approche plus conservatrice de l'aciériste traditionnel rompu à l'affinage au convertisseur Martin, […] ce dernier point de vue prônant en général le procédé Kaldo. Ce n'était pas, comme cela pourrait apparaître, un simple préjugé ou un conservatisme abruti, mais plutôt la prise en compte d'une réflexion avant-gardiste sur l'évolution des produits sidérurgiques et leur commercialisation. […] Rétrospectivement, cette décision pourrait bien être jugée comme un gaspillage de capital, mais, indubitablement, la problématique était alors moins claire qu'elle l'apparût par la suite[25]. »

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e (en) « Consett Iron Co », Grace's Guide,
  2. a b et c (en) William Jenkins, Description of the Consett Iron Works, Mawson, Swan, & Morgan, (1re éd. 1892) (lire en ligne), « Early history »
  3. (en) « Stanhope and Tyne Railway », Disused Stations,
  4. [PDF](en) John Marley, « North of England Institute of Mining Engineers. Transactions. », North of England Institute of Mining Engineers, , p. 168
  5. (en) « Consett Iron Co. Ltd. », sur Durham Mining Museum
  6. (en) « Consett Iron Co Ltd », sur Discovery, The National Archives
  7. Samson Jordan, Métallurgie du fer et de l'acier : études pratiques et complètes sur les divers perfectionnements apportés jusqu'à ce jour dans la fabrication de ces deux métaux, Librairie Centrale des Arts et Manufactures, , p. 319-328
  8. Tucker 2013, p. 170-171
  9. a et b (en) Kenneth A. Tucker, Business History : Selected Readings, Routledge, (ISBN 978-0-7146-3030-4 et 0714630306), p. 158
  10. a et b Tucker 2013, p. 164
  11. [PDF](en) A.S. Wilson, The Consett iron company limited : a case study in Victorian business history : PhD Thesis, Université de Durham, (lire en ligne), p. 36
  12. Tucker 2013, p. 154
  13. Tucker 2013, p. 157
  14. Jenkins 2008, p. 3
  15. Jenkins 2008, p. 4
  16. Wilson 1973, p. 231
  17. (en) « Consett Iron Works, Consett, 1929 », sur Britain from above
  18. Jenkins 2008, p. 5
  19. Jenkins 2008, p. 77
  20. Tucker 2013, p. 159
  21. Wilson 1973, p. 233–240
  22. (en) James Albert Allen, Studies in Innovation in the Steel and Chemical Industries, Manchester University Press, , 246 p. (ISBN 0-678-06790-2 et 978-0678067901), p. 141
  23. (en) The Consett story, Ramsden Williams, , 179 p. (ASIN B000IZ8S3I, lire en ligne), « Local industry »
  24. (en) John L. Griffith, Some aspects of the effect of atmospheric pollution on the Lichen Flora to the West of Consett Co. Durham, (lire en ligne), p. 14
  25. Allen 1967, p. 196
  26. a et b (en) Louis Cassier, « Consett », Iron and Steel, IPC Science and Technology Press, vol. 45,‎
  27. (en) Alasdair M. Blair, « The British iron and steel industry since 1945 », Journal of European Economic History, vol. 26, no 3,‎ , p. 571–81
  28. (en) « Nation on Film: Steel Towns - from Boom to Bust », BBC,
  29. (en) Kerry Wood, « Consett remembers closure of its steelworks », sur www.chroniclelive.co.uk,
  30. (en) Henry Thorold, County Durham (Shell Guides), Faber and Faber, (ISBN 978-0-571-11640-9), p. 192
  31. (en) Ray Marshall, « Remember When Stories », sur Focus on Consett meltdown as steelworks shut, Evening Chronicle,
  32. (en) « Local History: Consett heritage in pictures », BBC,
  33. (en) « Consett, County Durham », NorthEastLife
  34. (en) « Photographs of Consett », Railscot
  35. (en) David Bowen, « First they shut the Consett works and then came recession but ... The steel remains », The Independent,

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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