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Gabrielle Douglas,"The Flying Squirrel" croque l'or olympique

L'Américaine a remporté à 16 ans le titre au concours général en individuel. Grâce au sourire de son entraîneur chinois.

Par Erwan Le Duc, correspondant à Londres

Publié le 03 août 2012 à 03h48, modifié le 03 août 2012 à 09h17

Temps de Lecture 3 min.

The Flying Squirrel en action, le 2 août à Londres.

"En fait, je réalise que je n'avais aucune idée de ce que je voulais faire. Vous vous dites que vous avez un rêve, et puis vous le réalisez. Et c'est différent de ce que vous aviez imaginé... Je n'avais jamais imaginé ça..." Dans son justaucorps scintillant, Gabrielle Douglas lève les yeux au ciel. Vers cet Olympe que la jeune Américaine, tout juste 16 ans, vient d'atteindre. Après avoir gagné la médaille d'or du concours par équipe, Douglas a décroché, jeudi 2 août, son Graal : le titre olympique du concours général en individuel.

Elle est devenue au passage la première afro-américaine sacrée dans cette discipline. Une question qu'elle élude rapidement, avec une fausse naïveté toute adolescente : "Ah ça... je n'y avais pas pensé, c'est super, j'en suis honorée..." Car l'histoire de Gabrielle Douglas est ailleurs. Elle prend ses racines dans cette journée de 2008, passée devant la télévision à regarder le concours de gymnastique des Jeux de Pékin. La gamine n'a d'yeux que pour un homme : Liang Qiao, ancien champion chinois devenu entraîneur au sein de l'équipe américaine. Douglas le sait, c'est avec lui qu'elle veut travailler pour viser les sommets. Parce qu'il ne cesse de sourire, peu importe la tension et les enjeux.

Convaincue, la jeune fille met du temps à persuader sa mère, réticente à un projet a priori inconcevable. Pour la bonne raison que Qiao, qui se fait appeler "Chow" pour faciliter la prononciation outre-atlantique, est installé à West Des Moines, Iowa. Très loin des plages de Virginie où grandit l'apprentie gymnaste. Mais Douglas a l'intuition de la rencontre décisive, ce qui laisse admirative la coordinatrice de l'équipe américaine, Martha Karolyi, légende roumaine de la gymnastique, qui a entrainé 15 championnes olympiques aux côtés de son mari Bélà, dont une certaine Nadia Comaneci. "Que Gaby ait vu, à un si jeune âge, qu'elle pouvait s'améliorer en travaillant avec ce coach en particulier, c'est un signe de maturité incroyable...", expliquait Karolyi après la compétition.

Liang Qiao et Gabrielle Douglas, le 2 août à Londres.

UN DUO QUI DÉTONNE

Un matin, Liang Qiao voit donc débarquer à la porte de son gymnase une gamine de 14 ans qui lui soutient mordicus qu'ils doivent collaborer. L'homme rechigne, ne voulant pas prendre la responsabilité d'éloigner l'enfant de sa famille. Mais Gabrielle Douglas ne lâche pas. Avec la bénédiction de sa mère, elle s'installe, naviguant d'une famille d'accueil à l'autre avant de se poser chez un couple d'amis de Qiao, lesquels acceptent d'ajouter un couvert à une tablée déjà remplie par quatre fillettes, toutes plus jeunes. Douglas prend ses marques, la progression éclair peut commencer.

Il faudra pourtant à Qiao un long apprentissage, afin qu'il comprenne comment aider au mieux sa protégée. "Quand vous l'avez vu arriver, vous pensiez qu'elle pourrait être championne olympique ?", interroge un journaliste américain. "Non..." répond en rigolant Qiao, avant de filer dans les couloirs de la Greenwich Arena en s'excusant avec style : "J'ai du mal à réfléchir, je suis tellement heureux..." Car au-delà des heures d'entraînement, ce sont les mots qui mettent du temps à faire leur effet. Inconstante, Douglas a l'habitude d'alterner le pire et le meilleur. Ses performances de haut vol, son aisance dans les airs et son gabarit de poids plume lui offrent tout de même un surnom, qui reste encore : The Flying Squirrel, l'écureuil volant.

A Londres, Douglas s'est effectivement envolée. Enfin convaincue de son talent, et libérée de ses doutes, protégée par le sourire en forme de bouclier de son coach. L'attelage de la gamine afro-américaine et du rieur coach chinois accroche forcément l'œil sur les tapis, et une imagination galopante se prend vite à réécrire une version gymnastique du film Karaté Kid (version originale bien sûr). Le duo fonctionne en symbiose : quand elle trépigne après un passage brillant à la poutre, il se place devant elle, lui parle, pour la remobiliser mais surtout pour éviter qu'elle ne perde sa concentration en suivant les passages de ses concurrentes. "Je lui avais aussi interdit de regarder le tableau avec les classements provisoires... mais je sais qu'elle l'a fait quand même...", pestait Liang Qiao.

Impassible, Douglas n'a semblé se relâcher que lors de son passage au sol, à la toute fin du tour de piste, un sourire venant illuminer son visage encore adolescent. Ce sourire qui répondait à celui de Liang Qiao, et qui n'allait plus les quitter de la soirée. "Je vais profiter, mais je n'ai toujours pas percuté que j'avais gagné la médaille d'or par équipe, alors celle-là... ", soufflait Gabrielle Douglas. Avant de formuler une dernière requête : "Je l'aime bien, mais si vous pensez à un nouveau surnom, faites-le circuler..." Non, désolé, mais The Flying Squirrel, c'est parfait.

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