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Brésil: à peine élu, Jair Bolsonaro commence la chasse aux opposants de gauche

Jair Bolsonaro, le président-élu du Brésil, lors du second tour de la présidentielle, le 28 octobre.

Jair Bolsonaro, le président-élu du Brésil, lors du second tour de la présidentielle, le 28 octobre. - Mauro Pimentel - AFP

Après sa victoire de dimanche dernier, le président élu du Brésil Jair Bolsonaro entend montrer qu'il est déterminé à concrétiser ses promesses de campagne, en tête desquelles la lutte contre la corruption et la traque des opposants politiques de gauche.

Il ne prendra ses fonctions qu'en janvier, mais Jair Bolsonaro prépare le terrain. Cette semaine, le nouveau président élu du Brésil s'est attelé à la formation de son équipe gouvernementale. Objectif: mettre en oeuvre une politique radicale en matière de violence ou de corruption, les grands thèmes lui ayant permis d'être choisi par les Brésiliens. La nouvelle figure de l'extrême droite entend également s'attaquer à ses opposants politiques de gauche, plus que jamais dans son collimateur. 

Une promesse de campagne

Dans les derniers jours de sa campagne, Jair Bolsonaro avait multiplié les propos incendiaires à l'égard de la gauche, promettant en cas de victoire de "nettoyer" le pays des "marginaux rouges", et assurant également que l'ancien président Luiz Ignacio Lula allait "pourrir en prison".

Celui qui a été élu avec 55,1% des voix avait prévenu qu'il ne laisserait à ses opposants de gauche que le choix entre l'exil ou la prison. "Si cette bande veut rester ici, ils vont devoir se soumettre à la loi comme tout le monde. Ou ils s'en vont ou ils vont en prison. Ces marginaux rouges seront interdits (de séjour) dans notre patrie", a-t-il averti.

Le juge qui a condamné Lula entre au gouvernement

Et la nomination au poste de ministre de la Justice du juge Sergio Moro, une figure emblématique de la lutte anticorruption au Brésil, tend à suivre cet objectif. Sergio Moro, 46 ans, est le juge de première instance chargé de l'opération "Lavage express", cette enquête tentaculaire qui a révélé un gigantesque réseau de corruption autour du groupe étatique Petrobras ayant éclaboussé l'ensemble de la classe politique brésilienne.

Son principal fait d'armes est la condamnation, en juillet 2017, de l'ex-président de gauche Luiz Inacio Lula, la cible privilégiée de Jair Bolsonaro. De son côté, la gauche accuse Sergio Moro de s'être acharné contre Lula, condamné "sans preuve", selon ses avocats. 

Mais l'annonce de sa nomination déchaîne les passions au Brésil. Considéré comme un héros par de nombreux Brésiliens, il était attendu par des dizaines de fans vêtus de t-shirts à son effigie à son arrivée jeudi matin au domicile de Jair Bolsonaro, à Rio de Janeiro.

Battisti bientôt extradé?

Dans les derniers jours de sa campagne, Jair Bolsonaro avait fait part de son intention d'extrader l'ancien activiste de gauche Cesare Battisti, condamné à la perpétuité pour meurtres en Italie en 1993 et exilé au Brésil depuis 2004, après plusieurs années en France. Si Rome a multiplié les demandes d'extradition à son égard ces dernières années, Battisti avait notamment été protégé par le président Lula, qui avait refusé en 2010 de l'envoyer à Rome.

"Je réaffirme mon engagement d'extrader le terroriste Cesare Battisti, adoré par la gauche brésilienne, immédiatement en cas de victoire à l'élection", avait ainsi déclaré le candidat d'extrême droite lors du second tour de la présidentielle, le 28 octobre.

Interrogé par la Rai, la radiotélévision italienne, Cesare Battisti, aujourd'hui âgé de 63 ans, a estimé que la volonté de Jair Bolsonaro est inconcevable et impossible. "Bolsonaro peut dire ce qu'il veut, je suis protégé par la Cour suprême. Ce ne sont que des paroles, des fanfaronnades. Il ne peut rien faire, il y a une justice et je suis protégé par la justice", a-t-il déclaré mercredi. 

Les universités dans le viseur

Enfin, toujours pour lutter contre l'opposition à gauche, Jair Bolsonaro entend faire pression sur les professeurs d'université qui parleraient de politique pendant leurs cours. 

Le président élu a récemment scandalisé une partie du monde éducatif en accusant des professeurs, cités avec leurs noms et prénoms, de défendre les régimes de Cuba et de Corée du Nord devant leurs élèves, dans une vidéo diffusée sur Internet.

Et pour y remédier, il compte installer des pancartes devant les salles de cours pour appeler les étudiants à dénoncer leurs professeurs par le biais d'une "hotline" téléphonique dédiée à la question. 

Adrienne Sigel