Rio 2016 : Une année de préparation… et de questions

Les premiers Jeux Olympiques organisés sur le sol Sud-Américain s’ouvriront dans un an, le 05 août 2016, au cœur du mythique Stade Maracana de Rio de Janeiro (Brésil).

A un an de cette date historique, les préparatifs se poursuivent à un rythme soutenu, avec l’aménagement du Village des Athlètes à 85% ou encore l’installation des premiers sièges au sein du Parc Olympique de Barra da Tijuca.

Mais les travaux olympiques ne sont pas les seuls engagés dans la cité carioca.

Les Brésiliens profitent en effet de l’opportunité d’accueillir les JO pour repenser la circulation automobile et les transports dans une ville congestionnée par les embouteillages.

Le stockage des eaux pluviales, le paysage urbain, la culture, les loisirs… plusieurs domaines sont aujourd’hui impactés par les chantiers et devraient connaître une véritable renaissance d’ici l’année prochaine.

(Crédits - Rio 2016)
(Crédits – Rio 2016)

Mais derrière ce constat, force est de constater que d’autres domaines ne sont pas en voie d’amélioration ou si peu. Si de nouveaux retards dans les travaux de construction ne sont pas à écarter, c’est une autre problématique qui inquiète aujourd’hui.

Ainsi, malgré les engagements ambitieux formulés en 2009 au moment de son élection comme Ville Hôte des JO, Rio de Janeiro ne sera pas en mesure de proposer une dépollution optimale de la baie de Guanabara.

C’est pourtant dans ce lieu que doivent se dérouler les épreuves olympique de voile.

Toutefois, une récente étude de l’Associated Press (AP) a démontré un taux de pollution particulièrement élevé et susceptibles de porter atteinte à la santé des athlètes. Cette étude, menée en coopération avec des experts, s’est concentrée sur trois sites qui accueilleront pas moins de 1 400 athlètes : la Marina da Glória dans la baie de Guanabara (voile), le lac Rodrigo de Freitas (aviron et canoë-kayak) et Copacabana (épreuve de natation du triathlon).

Les résultats obtenus sont effarants et ont de quoi inquiéter les athlètes qui participeront aux épreuves concernées.

« Nos tests montrent que les eaux sont parmi les plus polluées des sites olympiques, avec des résultats allant de 14 millions d’adénovirus à 1,7 milliard par litre !

Par comparaison, les experts qui surveillent les plages de Californie du Sud, lancent l’alerte dès que les chiffres atteignent 1 000 bactéries par litre » ont notamment affirmé les journalistes et les experts après avoir réalisés cette étude indépendante.

De fait, les trois quart des échantillons ont révélé des taux largement supérieurs aux seuils autorisés.

Comme l’explique John Griffith, biologiste en Californie du Sud, « cette pollution est essentiellement liée aux eaux usées. C’est toute l’eau des toilettes et des douches ainsi que les déchets que les gens mettent dans leur évier.

Avec des telles analyses, ces sites de compétition seraient immédiatement fermés aux États-Unis. Tout le monde court le risque d’infection dans ces eaux polluées ».

Le propos est sévère, mais il témoigne bien du manque d’engagement des autorités locales et régionales.

(Crédits – Ricardo Moraes / Reuters)
(Crédits – Ricardo Moraes / Reuters)

En septembre 2014 encore, le Gouverneur de l’État de Rio de Janeiro, répondait aux critiques en promettant un traitement des eaux usées de l’ordre de 80% d’ici l’ouverture des festivités olympiques.

Pour y parvenir, un vaste plan de dépollution avait été adopté et devait permettre l’installation d’une station de pompage des eaux usées (450 litres par seconde) ainsi qu’un système de collecte et un kilomètres de canalisations autour de la Marina. Des bateaux devaient en outre être mobilisés, notamment dans le but de ramasser les objets flottants (bidons, pneus…) et les poissons morts.

Les travaux devaient débuter fin 2014 pour un achèvement en septembre 2015.

Néanmoins, en mars de cette année, les efforts annoncés n’ont pas apportés les résultats escomptés, avec seulement 49% des eaux qui auraient été traitées. Il faut dire que les autorités ont sans doute sous estimé la tâche à accomplir, au regard des moyens logistiques et financiers à mettre en œuvre dans une baie aussi vaste et polluée.

A titre d’exemple, le traitement des eaux par bateaux devait nécessiter la mobilisation de 3,3 millions de reals brésiliens (865 000 euros). Au mois de mars 2015 toutefois, 500 000 reals brésiliens (131 000 euros) manquaient aux autorités pour pouvoir assurer ce traitement.

Vue aérienne de la Marina da Glória (Crédits – Rio 2016 / Alex Ferro)
Vue aérienne de la Marina da Glória (Crédits – Rio 2016 / Alex Ferro)

La question de la pollution des eaux de Rio n’est pourtant pas la seule problématique qui se pose aux organisateurs des prochains Jeux d’été.

En effet, la sécurité semble être un épineux problème également.

Dans un pays gangréné par une violence quotidienne et face à des taux d’homicides élevés, les autorités ont décidé de mettre en place un vaste programme et ce, depuis plusieurs années maintenant, notamment au travers du projet « Territoires de Paix ».

Initié sous la présidence de l’ancien dirigeant brésilien, Lula, ce programme visait dès 2008 à lutter contre les trafics et la violence dans les favelas mais aussi à pacifier ces quartiers de Rio grâce à des aides sociales à destination des familles.

Ainsi, le programme prévoyait l’octroi d’une bourse de 59 euros mensuels pour les mères de famille souhaitant agir en qualité de médiatrices dans les quartiers. Les jeunes, âgés de 15 à 24 ans, désireux d’intégrer un programme associatif pouvaient quant à eux percevoir 31 euros par mois.

Outre les mesures économiques et sociales, l’ambitieux programme « Territoires de Paix » répondait aussi à un besoin de réhabilitation urbaine. Plusieurs quartiers ont ainsi été rasés mais les nouveaux logements se font parfois attendre et ce, d’autant plus lorsque l’on sait que les Jeux attirent les promoteurs immobiliers soucieux d’engranger de juteux contrats et de formidables bénéfices.

Les résultats du programme économico-socialo-sécuritaire ne seront peut-être pas connus avant la fin des Jeux, mais le bilan à un an de l’événement n’est pas forcément celui qui était attendu lors du lancement de cette politique.

La violence, même si elle est en baisse à Rio, est toujours un problème de société.

Si le Brésil n’est pas une cible prioritaire des terroristes, la présence attendue d’athlètes en provenance de pays engagés dans les conflits actuels mais surtout la violence quotidienne au Brésil, expliquent toutefois la mobilisation sans précédent de moyens humains et logistiques à Rio et dans le pays en vue des Jeux.

La semaine dernière, les autorités ont annoncé la présence de 85 000 force de l’ordre (policiers, militaires…) dont 47 000 uniquement sur les sites de Rio de Janeiro.

Ces chiffres ont ainsi fait dire à Andrei Augusto Passos Rodrigues, Ministre de la Justice, que les préparatifs en cours constitueraient « la plus grande opération de sécurité dans l’Histoire du Brésil ».

Ni plus, ni moins.

Le Président du CIO, Thomas Bach, et la Présidente du Brésil, Dilma Rousseff (Crédits – Rio 2016 / Roberto Stuckert Filho / PR)
Le Président du CIO, Thomas Bach, et la Présidente du Brésil, Dilma Rousseff (Crédits – Rio 2016 / Roberto Stuckert Filho / PR)

Pollution, retards, sécurité… Et comment évoquer Rio 2016 sans aborder l’impact politique au Brésil ?

Depuis sa désignation en 2009, Rio 2016 est en effet intrinsèquement lié à la politique et est même une affaire politique au regard des enjeux et de l’image de l’événement sur la scène internationale.

Mais les récents déboires politico-judiciaires de la majorité présidentielle pourraient venir perturber les derniers mois de préparation des Jeux. Des sociétés participant à l’aménagement des sites olympiques sont ainsi impliquées dans le scandale Petrobras, de même que nombre d’élus proches de la Présidente Dilma Rousseff.

Une Présidente qui, après avoir été la cible de vives critiques en marge de la Coupe du Monde de football 2014, pourrait d’ailleurs jouer son va-tout lors du mois olympique et paralympique de l’année 2016.

Une réussite organisationnelle ne sera sans doute pas portée à son crédit – au regard de sa faible popularité – mais un échec sera immanquablement considéré comme résultant des choix et de la politique de la Présidente du Brésil. Un échec qui pourrait alors conduire Dilma Rousseff vers la sortie.

Nous n’en sommes pas encore là.

5 pensées

  1. La cérémonie d’ouverture sera déjà une épreuve-test pour la présidente Roussef, notamment lorsqu’elle devra déclarer les Jeux ouverts…en effet, comme lors du mondial 2014, il n’est pas à exclure qu’elle essuie les sifflets du public. Devant 1 milliard de téléspectateur, pour couronner une présidence déjà bien mouvementé et éclaboussé par les scandales, pas sûr qu’elle digère. Dommage, pour des Jeux qui malgré les polémiques, s’annoncent grandioses et historiques.

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