Marché de l’électricité : Paris défie Berlin sur le calendrier de réforme

Agnès Pannier-Runacher, ministre française de la transition énergétique, s'exprime lors d'un conseil spécial de l'UE sur la crise énergétique à Bruxelles, en Belgique, le 24 novembre 2022. [EPA-EFE/OLIVIER HOSLET]

Le cabinet de la ministre française de l’Énergie a affirmé vendredi (24 février) sa volonté de boucler la réforme du marché européen de l’électricité d’ici la fin de l’année, défiant ainsi Berlin qui préfère attendre les élections européennes de 2024. 

Les ministres de l’Énergie se rencontrent lundi et mardi (1 et 2 mars) à Stockholm pour un conseil informel sur les questions énergétiques. 

À l’ordre du jour, la réforme du marché européen de l’électricité, dont la baisse des approvisionnements en gaz russe a révélé les failles sur ses capacités à gérer les hausses de prix. 

Pour le rendre plus résilient, la Commission européenne présentera une proposition de réforme le 14 mars prochain.

Or, ni le principe, ni le calendrier de la réforme ne font consensus au sein des États membres, notamment entre la France et l’Allemagne. 

Berlin plaide pour attendre les élections européennes de 2024, tandis que Paris, par la voix du cabinet de la ministre de l’Énergie, Agnès Pannier-Runacher, a réaffirmé vendredi sa volonté « d’avoir un accord avant les élections européennes ».

À Stockholm, en l’absence du ministre de l’Économie et du Climat allemand Robert Habeck, Mme Pannier-Runacher s’entretiendra, « en principe », avec Sven Giegold, secrétaire d’État de l’Économie et de la Protection du Climat. 

L’occasion pour les deux dirigeants d’aborder, entre autres, le calendrier de la réforme du marché de l’électricité. 

Lundi dernier (20 février), Robert Habeck affirmait lors d’un évènement à Berlin souhaiter une réforme de fond « qu’après les élections européennes », soit après mai 2024. 

Le vice-chancellier allemand a exposé son calendrier avec une position officielle de Berlin qui n’interviendra qu’après l’hiver 2023-2024, suite à la consultation des acteurs nationaux du secteur.

Berlin ne veut pas de réforme du marché de l’électricité avant les élections européennes

Alors que la Commission européenne travaille à la réforme du marché européen de l’électricité, avec le soutien de la France et de l’Espagne, l’Allemagne fait pression pour que cette réforme soit reportée après les élections européennes de 2024.

Paris veut un accord d’ici la fin de l’année

Au contraire, le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher plaide pour l’adoption d’une « orientation générale » par le Conseil de l’UE réunissant les 27 États membres « d’ici la fin de la présidence suédoise », soit avant le 1er juillet.

Paris n’en démord pas depuis que Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie, a affirmé mi-janvier qu’il souhaitait une réforme « dans les six mois », rapportait le journal Les Echos. 

Le cabinet de la ministre de l’Énergie tempère et propose plutôt un accord final « qui aboutisse sous présidence espagnole », soit d’ici fin décembre 2023.

« Si nous n’avons pas d’accord avant les élections européennes de 2024, cela reporte la réforme à bien plus tard, le temps que les nouvelles institutions se mettent en place », soit « deux à trois ans après le début de la crise énergétique, à un moment où tous nos partenaires internationaux réagissent très fort », explique le cabinet de la ministre.

Un « temps perdu » pour les industriels qui ont besoin d’une réforme rapide, au risque « de perte de compétitivité et de délocalisations », ajoute le cabinet. 

Réforme du marché de l’électricité : l’Allemagne se heurte à la France et à l’Espagne

À trois semaines de la publication de la proposition de la Commission européenne pour réformer le marché européen de l’électricité, l’Allemagne élabore encore sa position annonciatrice d’un conflit avec les pays favorables à la réforme, comme la France et l’Espagne.

Confrontation des alliances 

De toutes les manières, la décision de réforme « se prendra à 27 », affirme l’entourage de la ministre, laissant penser qu’une majorité qualifiée au Conseil de l’UE sera suffisante — au moins 15 États membres représentant 65% de la population de l’UE — pour adopter une position commune. 

À ce petit jeu des alliances, l’Allemagne pourrait ainsi se retrouver en minorité, avance le ministre luxembourgeois de l’Énergie, Claude Turmes.

Selon lui, il est « relativement probable » que la France dispose d’au moins 14 autres États alliés, c’est-à-dire ceux ayant obtenu de la Commission qu’elle plafonne les prix du gaz en décembre dernier. 

De l’autre, six États membres — Luxembourg, Danemark, Estonie, Finlande, Lettonie et Pays-Bas — font déjà front commun avec l’Allemagne et appellent la Commission à entreprendre une réforme prudente. 

Pour peser plus lourd, M. Turmes attend de l’Allemagne qu’elle déploie « sa force de frappe […], pas seulement du gouvernement, mais aussi de tous les acteurs réunis ». 

Face à ces injonctions, la Commission européenne devrait proposer une réforme reprenant, à minima, les points qui font relativement consensus, comme l’assouplissement des règles de la concurrence européenne sur la durée des contrats d’achat d’électricité.

À Stockholm, puisqu’il s’agira d’un conseil « informel », il n’y aura pas d’adoption de texte législatif à l’issue des deux jours de réunion.

EXCLU : l'Union française de l'électricité partage ses recommandations sur la réforme du marché européen

EXCLUSIVITÉ. Pour EURACTIV France, la présidente de l’Union française de l’électricité (UFE) revient sur les recommandations de la fédération sur la réforme du marché européen de l’électricité en amont de la proposition de réforme de la Commission européenne à venir le 14 mars prochain.

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