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Tjibaou, Jean-Marie, Missotte, Philippe, Folco, Michel, Rives, Claude. Kanake, Mélanésien de Nouvelle-Calédonie

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COMPTES RENDUS

Tjibaou, Jean-Marie, Missotte, Philippe, Folco, Michel, Rives, Claude. Kanake, Mélanésien de Nouvelle- Calédonie. Les Éditions du Pacifique, Papeete, 1976. 120 p., 1 carte, 146 photos couleur.

Pour une fois le peuple mélanésien de Nouvelle-Calédonie et des Iles Loyalty est présenté par Tun des siens, dans d'excellentes conditions d'édition, en un ouvrage étonnant pour celui qui a vécu depuis trente ans une Calédonie où les Canaques n'avaient pas leur place. Il fait suite à la plaquette publiée au moment du Festival : Vers Melanesia 2.000, réalisée par Jean-Marie Tjibaou, Henry Ajapunia, Jacques Iekaw, Basil Citre et Philippe Missotte. Graphical, Nouméa 1975. 56 p., 1 carte, 61 photos dont 50 couleurs, 2 figures.

J'avais beaucoup aimé cette plaquette, vive, brillante, spontanée autant qu'habilement construite, qui criait en un langage d'un lyrisme inhabituel la volonté du peuple mélanésien d'apparaître enfin au grand jour avec sa force calme, sa dignité, ses besoins et son désir d'être reconnu.

Le Festival avait déjà difiusé un programme illustré et commenté, soit pour la référence : Tjibaou (Jean- Marie) et aim — Festival d'art melanesia — Melanesia 2.000. 36 p., 1 plan, 9 photos, 28 cl. trait. Les textes en étaient déjà annonciateurs d'un renouveau en profondeur, d'une volonté de se retrouver entre soi et de réaffirmer les liens de la tradition avant de se présenter, globalement, devant les Européens, en espérant, cette fois, être pris au sérieux.

Cette série de publications, qui s'appuient l'une l'autre, est pour l'essentiel l'œuvre d'une personnalité de premier plan : Jean-Marie Tjibaou, fils du chef de la tribu de Tiedanit, ayant su abandonner à temps la prêtrise pour un apostolat laïc plus proche des siens, époux d'une jeune femme protestante de grande qualité, Marie- Claude Wetta, fille de Mataio Doui Wetta, vieux lutteur pour l'émancipation de son peuple. Des échos de ce que l'on a appelé la rébellion de 1917, et qui ne fut que les conséquences des provocations de la colonisation blanche, aux luttes politiques de l'après-guerre, Jean-Marie Tjibaou marie en lui toute une tradition de résistance et de progrès épuisants, mais continus, à une intelligence aiguë de ce que le peuple canaque renaîtra par l'action de ses femmes. Fondateur avec Mme Scholastique Pid- jot, épouse du Député de la Nouvelle-Calédonie, de l'Association Féminine pour un Souriant Village Mélanésien, il a ouvert à son peuple des voies nouvelles à explorer, à pas prudents, imaginé de nouveaux outils pour son renouveau. Le « Festival Melanesia 2.000 » a été, au départ, une proposition féminine. Les femmes canaques en ont constitué l'ossature, persuadant leurs hommes, les entraînant avec elles, s'assurant qu'il n'y aurait aucun trouble ni aucune beuverie, faisant ainsi la

tion, à laquelle personne ne croyait, de la discipline et de la force potentielle du peuple mélanésien.

C'est là un développement essentiel. L'Assemblée Territoriale et l'État ont fourni d'importantes subventions, la ville de Nouméa des prestations en journées d'emploi de gros matériel, l'Armée et la Marine ont aidé au transport des individus. Mais leur effort, louable, courageux même étant donné les pressions constantes et souterraines pour que le Festival n'ait pas lieu, n'aurait rien été si le courant n'avait passé et si les Mélanésiens ne s'étaient mis en marche, en tant que peuple, faisant la démonstration de leur capacité d'unité, de leur calme, et de leur volonté d'affirmer, publiquement, qu'ils étaient là et qu'il faudrait bien les écouter.

L'intelligence de ce Festival n'était pas tant dans la construction de hameaux sur deux lignes de collines se faisant face, avec un art, venu du passé, de l'architecture du paysage, mais que pendant les premiers jours, le Festival ait eu lieu entre Mélanésiens, hors la présence d'Européens, de façon à ce que les groupes soient reçus à la manière canaque, et que de présentations en discours cérémoniels la structure du peuple présent, représentant tout l'archipel, fut manifestée, avant que ce peuple redevenu souriant — il ne l'avait plus été depuis plus d'une décade — accepte les Européens en visiteurs, avec simplicité et gentillesse. Il n'y avait rien là de cette triste mise en scène organisée par les Mormons, à Hawaii, ou des guides océaniens appointés misérablement récitent des textes bourrés d'inventions et qui trahissent quotidiennement leur culture.

Comme le Festival, les plaquettes et l'ouvrage analysés sont construits autour du jeu scénique proposé, deux soirs de suite, à une foule bigarrée, aux deux tiers mélanésienne, à un tiers européenne. Je n'y ai pas rencontré les membres des grandes familles bourgeoises calédoniennes, mais j'y ai vu beaucoup de petites gens, venus en famille, et qui découvraient là que les Canaques étaient tout autre chose que des sauvages en rupture de ban. Utilisant des non-professionnels comme acteurs, tous Mélanésiens, ce jeu scénique était d'une très grande beauté plastique, vécu intensément par ceux qui l'avaient joué, avec très peu de répétitions, exprimant l'équilibre de leur ancienne société, et les diverses formes militaires, commerciales, missionnaires de la tromperie des Blancs. Les morts en grand nombre, et la spoliation foncière, témoignent largement de la véracité des tableaux vivants malgré les raccourcis utilisés. La caricature du missionnaire, au delà des aspects multiples de la chris- tianisation, a été mal acceptée par ceux des clercs qui ne connaissent pas, ou craignent, la révolte de la jeune génération. Il fallait que ce soit dit publiquement, pour que l'atmosphère soit enfin éclaircie et qu'on cesse d'exiger des Mélanésiens une fidélité à une situation dépassée. Ils savent bien à qui ils ont si souvent dû une protection

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