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Les armateurs pour l'exonération des charges sociales des marins

Le récent rapport sur la situation de la marine marchande du député Arnaud Leroy, «met en évidence un différentiel de compétitivité entre les armateurs français et ceux des autres pays européens, allant jusqu'à 40 % avec le Danemark ou l'Italie», affirme Raymond Vidil Claude Paris/ASSOCIATED PRESS

INTERVIEW - Raymond Vidil, président d'Armateurs de France, s'alarme du manque de compétitivité de la filière face à ses rivaux européens.

Les déboires de la SNCM ne seraient-ils que la partie émergée de l'iceberg qui menace la flotte des navires immatriculés en France. Raymond Vidil, président d'Armateurs de France, le syndicat de la profession, s'alarme en tout cas du manque de compétitivité de la filière.

LE FIGARO. - Quels enseignements tirez-vous de la crise à la SNCM?

Raymond VIDIL. - Dans le maritime, la question de la concurrence n'est pas théorique. Pour les armateurs français, elle est surtout internationale mais est devenue communautaire sur de nombreuses activités autrefois préservées, comme les ferrys. Nous faisons face à cette concurrence avec difficulté car nous avons des contraintes spécifiques nationales. Le constat est indépendant du dossier SNCM, qui a des facteurs aggravants. La crise de la SNCM a révélé des dérives inacceptables (ports et bateaux bloqués, y compris celui d'un concurrent, sans que le préfet intervienne) et l'incapacité des autorités à laisser fonctionner nos ports. Le différentiel de compétitivité de la SNCM avec ses concurrents explique sa perte de parts de marché. Il y a les salaires mais surtout les charges, l'organisation et le temps de travail. À la SNCM, la CGT a construit une organisation du temps de travail allant bien au-delà de la convention collective finalisée en 2013.

La SNCM est-elle viable?

Non, la société n'est pas viable. Cela fait plusieurs années qu'elle perd 50 millions par an. En revanche, une desserte de la Corse depuis Marseille est viable parce qu'il y a un marché, que Marseille a fait la preuve depuis longtemps de sa capacité à être la métropole logistique de la Corse, ce qui suppose une activité considérable en arrière-port. Ce n'est pas pour rien que la dernière délégation de service public (DSP) est concentrée sur les marchandises et sur Marseille. Ce qu'il faut c'est une Société Nouvelle Corse Méditerranée. L'État actionnaire a une responsabilité dans la situation de la compagnie. Les conflits à répétition sont devenus insupportables pour notre communauté portuaire comme pour la collectivité corse. Plus personne à Marseille et en Corse n'accepte les errements de la SNCM. La faute de l'État actionnaire a été de privilégier la paix sociale à la vérité, de laisser croire que tout pouvait continuer comme avant. Le discours de vérité peut être entendu par les organisations syndicales, y compris la CGT, signataire de notre convention au niveau national. Il y a des similitudes avec la décrépitude de SeaFrance, qui s'est soldée par un dépôt de bilan. La reprise de l'activité par deux armateurs français montre qu'il est possible de repartir sur de nouvelles bases plus saines. Le projet de la direction de la SNCM me semble aller dans le bon sens. Il faut se remettre sur la voie de la solvabilité avant d'engager de nouveaux projets. La DSP n'est pas là pour compenser un défaut de compétitivité.

Ce problème de compétitivité ne se pose-t-il pas à l'ensemble des armateurs français?

Le récent rapport sur la situation de la marine marchande du député Arnaud Leroy, avec lequel nous avons beaucoup travaillé, dresse un constat terrible pour le pavillon français qui ne cesse de régresser. Il met en évidence un différentiel de compétitivité entre les armateurs français et ceux des autres pays européens, allant jusqu'à 40 % avec le Danemark ou l'Italie et même 100 % quand il s'agit du pavillon français de premier registre comme à la SNCM. Ces pays ont mis en place des exonérations de charges. C'est pourquoi nous sommes inquiets depuis que le gouvernement a demandé à Louis Gallois d'établir un plan stratégique de soutien aux compagnies maritimes françaises. On ne voudrait pas que le travail qui a été fait soit recommencé et que cela retarde la mise en œuvre des mesures indispensables dans le domaine de la fiscalité des entreprises, du coût de la main-d'œuvre et des mécanismes d'aides à l'investissement dans les navires.

Qu'attendez-vous en priorité?

Nous voulons une exonération totale des charges sur les salaires des marins comme chez nos principaux concurrents européens. C'est une des pistes préconisées par le rapport Leroy. Les entreprises sont prêtes à relever le défi de la compétitivité, mais il faut un double effort, de l'État sur les charges des marins et des syndicats qui doivent entendre le langage de vérité et cesser les conflits sociaux à répétition et les entraves.

Les armateurs pour l'exonération des charges sociales des marins

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3 commentaires
  • tardy

    le

    A la rubrique "charges sociale" et faux derchisme, il y a du travail. A la question: "La SNCM est elle viable?" On aurait pu répondre: Oui, si les charges sociales du concurrent était au même niveau. Au lieu de cela, on en remet une louche sur les poncifs habituels: "Paix sociale", "syndicats", "grèves"... Votre titre parle de "charges sociales des marins". Savez vous que la Corsica Ferries (le concurrent de la SNCM) est plus que privilégié par le contribuable italien. Pour le comprendre, vous pouvez visionner l'enquête en ligne sur daylimotion: "low cost: les dents de la mer". Là, vous comprendrez comment certains prennent les gens pour des imbéciles. Au fait, "Armateur de France" a bien la Corsica Ferries parmi ses membres. Pourtant cette compagnie bat pavillon italien, n'emploie que peu de français et a bénéficié des subventions de ce même État français et des ristournes fiscales de l’État italien (voir "les dents de la mer). Un peu de décence et de modestie seraient le bienvenue.

  • bleu10

    le

    Les transports aériens français sont aussi victime ; de futurs disparitions à prévoir ,pour les mêmes causes ,charges élevées et concurrence déloyale .

  • y2gwal

    le

    Ensuite, il faudra étendre l'exonération des charges à tout ce qui doit être compétitif à l'export, car c'est exactement le même problème !

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