En Autriche, les arts ont la cote

Les Autrichiens apprennent très tôt la musique. Et ce n'est pas superflu ! Explications au moment où le ministre de l'Education, Xavier Darcos, va signer une convention pour développer l'étude des arts en France.

En Autriche, les arts ont la cote

    TANDIS QUE des générations de petits Français ont pris la flûte à bec en grippe, rigolant des années après des cours de musique du collège, considérés alternativement comme un calvaire ou un défouloir entre deux cours réputés « sérieux », les petits Autrichiens s'adonnent sans complexes à la pratique musicale et artistique à l'école. Avec plaisir. Et des moyens, salles spécialisées et instruments, qui ont même impressionné le ministre français Xavier Darcos, en visite à Vienne l'hiver dernier. Lundi, il doit d'ailleurs signer une convention avec le ministère de la Culture et six grands partenaires musicaux Opéra, entre autres pour développer l'enseignement de la musique dans les établissements.

    « La musique est une tradition chez nous »

    La musique et les arts à l'école, de Vienne à Salzbourg en passant par les communes rurales plus modestes, ça commence dès le primaire. Depuis longtemps et sans complexes. Question d'histoire. L'Autriche est la patrie de Mozart, celle qu'ont choisie Beethoven, Strauss ou Schubertâ?¦ « La musique est une tradition chez nous », explique Barbara Neundlinger, à Kulturkontakt, institution viennoise qui travaille en cheville avec le ministère autrichien pour le développement de projets culturels. Une fois par semaine, les petits élèves de la Grundschule (école primaire, de 6 à 10 ans) ont une leçon de musique, et autant d'arts plastiques. Côté contenu, les petits Autrichiens chantent, écoutent de la musique, développent leur créativité en travaux manuels, dansentâ?¦

    Sur le papier, les petits Français sont a priori supposés en faire autantâ?¦ quand le reste du programme de français, maths et histoire en laisse le temps aux enseignants. Pourtant, dans l'Hexagone, la mayonnaise ne prend pas encore. Même si régulièrement les programmes le dernier en date entré en vigueur cette rentrée insistent sur l'importance de l'histoire des arts, par exemple. « Différence culturelle », analyse-t-on au ministère de l'Education nationale, rue de Grenelle. « En Autriche, comme en Allemagne et dans les pays scandinaves, l'éducation « Bildung » est considérée comme un tout : l'école ne doit pas seulement fournir une éducation « intellectuelle » aux enfants, mais former l'individu en entier, harmonieusement. »

    «Jouer d'un instrument, chanter en chorale supposent de la rigueur »

    « Traditionnellement, la musique fait partie, en Autriche (NDLR : comme en Allemagne), de la vie familiale. Du coup, c'est facile de l'inscrire aussi dans le cadre de l'école, puisqu'il existe de toute façon, partout dans le pays, des structures qui enseignent la musique. Ce qui n'est pas le cas pour la danse ou l'architecture », explique Barbara Neundlinger. Enfants et parents jouent souvent d'un instrument, chantent dans des chorales, très développées hors de l'école, même dans les petites villes de province où il n'existe pas, comme à Vienne, des écoles spécialement axées sur la musique.

    Les arts font encore partie des programmes obligatoires au lycée pour les 40 % d'élèves qui suivent la filière générale après l'équivalent du collège (de 10 à 14 ans). Les horaires hebdomadaires varient selon les Länder et les lycées, qui disposent de plus d'autonomie que leurs homologues français. Certains proposent ainsi, en option, un enseignement musical et artistique renforcé, jusqu'à trois à quatre heures par semaine, avec évaluation au bac pour ceux qui la choisissent ! Du superflu ? La question paraîtrait choquante en Autriche. Outre qu'il fait partie du curriculum pour tout Autrichien, « l'enseignement artistique n'a rien d'inutile. Il peut même aider à tous les autres ! justifie Barbara. Jouer d'un instrument, chanter en chorale supposent de la rigueur. Et apprend à travailler en groupe. »

    Localement, quelques établissements français l'ont déjà compris : persuadée que la musique peut être « vecteur de vie scolaire », l'académie de Créteil compte même promouvoir la création d'une chorale dans tous les collèges.