Deux juges de Pennsylvanie, Mark Ciavarella, 58 ans, et Michael Cohahan, 56 ans, ont touché plus de 2,6 millions de dollars (2 millions d'euros) de pots-de-vin pour condamner injustement des centaines d'adolescents à exécuter des peines dans des camps disciplinaires privés.
En décembre 2002, les deux juges du comté de Luzerne en Pennsylvanie, demandent et obtiennent la fermeture du centre de détention juvénile de leur comté, au motif qu'il était trop vétuste. A partir de 2003, lorsqu'un jeune est condamné, il est envoyé dans un centre de détention privé, PA Childcare ou Western PA Childcare, qui reçoit en échange des fonds de la part du comté de Luzerne pour couvrir les frais d'incarcération. En échange, les deux juges reçoivent des fonds qu'ils ont placés dans une société, en Floride. Il n'y a plus qu'à lancer le système.
Au total, quelque 5 000 jeunes de 13 à 18 ans ont été jugés coupables entre 2003 et 2006 dans cette ancienne région minière pauvre à majorité blanche. Plus de 2 000 d'entre eux ont été envoyés en détention, relève le Juvenile Law Center, une organisation de défense des jeunes, située à Philadelphie. Issus de familles dévaforisées et peu instruites, "les jeunes étaient des cibles faciles. Beaucoup d'entre eux n'avaient même pas d'avocats et quand ils demandaient un avocat commis d'office, on leur disait qu'il faudrait attendre des semaines", indique Marie Roda, porte-parole du Juvenile Law Center.
"J'AI DÉSHONORÉ MA FONCTION DE MAGISTRAT"
Une adolescente, Hillary Transue, a été envoyée pendant trois mois dans un camp de redressement pour avoir fait une fausse page sur Myspace moquant le principal adjoint de son collège. Un garçon a été envoyé pour neuf mois en détention pour avoir volé un flacon d'épices de noix de muscade d'une valeur de 4 dollars. Un autre jeune a été condamné à trois mois de détention pour avoir volé de la monnaie dans une voiture. Un garçon de 13 ans envoyé en camp de redressement plusieurs week-ends pour avoir exploré un bâtiment désaffecté.
Le Juvenile Law Center va déposer en fin de semaine les plaintes de plusieurs dizaines de familles, après qu'elles eurent appris que leur enfant avait été envoyé injustement en détention. D'autres familles ont porté plainte séparément. Les deux juges sont accusés de conspiration pour fraude contre les Etats-Unis. Ils ont reconnu devant un tribunal fédéral de Pennsylvanie avoir "conclu un accord pour garantir la fourniture de jeunes délinquants" auprès des deux sociétés privées d'exploitation de prisons. "Il est vrai que j'ai déshonoré ma fonction de magistrat, reconnaît Mark Ciavarella. Par mes actes, j'ai détruit tout ce que j'avais accompli par mon travail, et je ne peux que me blâmer moi-même."
La Cour suprême de Pennsylvanie a nommé un magistrat qui va revoir tous les cas traités par ces juges corrompus. En reconnaissant leur culpabilité, les deux juges, qui ont été suspendus mais laissés en liberté, risquent un minimum de sept ans de prison. Il peuvent être condamnés à une peine supérieure, allant jusqu'à vingt-cinq ans de détention. Leur jugement ne devrait pas intervenir avant plusieurs mois.
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